Bienvenue dans Développe. Cette semaine c’’est Nassima, je suis psychologue du travail, et je serai votre hôte durant cet épisode.
Aujourd’hui, nous allons aborder le dernier épisode de la série sur les inégalités hommes-femme dans le marché du travail. C’est un sujet politique, social et économique. Nous aborderons cette thématique à travers différent cadre théorique, mais surtout sous le prisme de la psychologie.
Aujourd’hui, la quête de l'égalité des genres prend de plus en plus d’ampleur. C’est un sujet qui touche particulièrement les femmes et il serait intéressant de comprendre comment les hommes pourraient jouer un rôle en tant qu'alliés. C'est le sujet d'étude des chercheures C. Closon et M. Nyssen. Leur étude explore le sujet, notamment dans les domaines à forte prédominance masculine comme les STEM (sciences, technologie, ingénierie et mathématiques). Cet article est une vulgarisation de l’article scientifique Gender requalifiés: Men allies in STEM – Motivations and barriers de C. Closon et M. Nyssen, paru dans la revue Psychologie du Travail et des Organisations, cette année. Les auteurs s’intéressent à la perception, aux motivations et aux freins des hommes à devenir des alliées pour l’égalité de genre dans les métiers STEM. On vous explique tout ici.
Toutes les sources sont issues de l’article original. Vous le trouverez dans la bibliographie.
Petit point méthodologique
Tout d’abord, faisons un petit point méthodologique. Pour réaliser cette étude, les chercheurs ont recruté leur participant via un réseau social. Les participants étaient au nombre de sept. Pour pouvoir participer, ils devaient répondre aux critères suivants : avoir envie de participer à cette étude, être un homme et travailler dans le domaine de STEM. Les participants ont en moyenne 49 ans. Avec ces participants, les recherches ont réalisé des entretiens semi-directifs d’environ 50 minutes, qu’ils ont enregistré, puis retranscrit afin de pouvoir réaliser des analyses qualitatives. L’analyse qualitative est une méthode de recherche utilisée pour explorer et comprendre des phénomènes, des expériences, des opinions ou des comportements en profondeur. Elle se concentre principalement sur la signification, les perceptions et les émotions plutôt que sur des données numériques ou statistiques.
Elle repose souvent sur des données collectées à partir d’entretiens (individuels ou de groupe, comme des focus groups), d'observations directes, de documents (textes, vidéos ou autres contenus). Les résultats de l’analyse qualitative sont interprétés pour identifier des thèmes, des tendances ou des patterns. Cette méthode est particulièrement utile lorsque l’objectif est de comprendre des contextes complexes
Le cadre théorique
Maintenant, un peu de théorie. Rappelons-nous que l’étude s’intéresse au rôle « d’allié » des hommes dans la quête de l’égalité homme femme.
Parmi les sept participants de cette étude, la majorité n’était pas familière avec la définition du terme allié dans sa forme la plus stricte. Certains expliquaient qu’être allié de la cause de l’égalité de genre signifiait « devoir des proches aux hommes ». Pour le reste des participants, être allié renvoie au fait de soutenir l'égalité des genres, soit en aidant à changer les mentalités, soit en intervenant face à des comportements discriminatoires. Cependant, cet engagement reste souvent superficiel. En effet, bien qu'ils se déclarent alliés, les exemples qu'ils partagent relèvent davantage de petites anecdotes que d'une réelle implication dans la lutte contre les inégalités. Pourtant, leur soutien est important, car la parole des hommes a plus de poids que celle des femmes qui sont très souvent sous-représentés dans le milieu des STEM.
Ce que l’étude révèle
L’étude nous révèle plusieurs choses. Il existe un déni du sexisme structurel, les motivations dans la quête de l’égalité femme-homme sont diverses et ce n’est pas toujours les bonnes et les freins qui empêchent les hommes d’adhérer au mouvement. L’étude propose enfin des solutions pour pallier ces problématiques.
Perceptions des inégalités : le déni du sexisme structurel
De manière unanime, les participants à l’étude minimisent la persistance des inégalités de genre dans leurs milieux de travail. Ils attribuent les écarts entre hommes et femmes à des choix individuels ou au mérite. Lorsqu’ils reconnaissent des comportements sexistes, ils les associent à des individus isolés, plutôt qu'à un problème systémique. Ce manque de prise de conscience des discriminations structurelles rend difficile la réflexion sur les inégalités.
Mais qu’est ce qui peut motiver les hommes à devenir des alliés ?
Les motivations morales dominent chez les participants : ils agissent en tant qu'alliés parce qu'ils estiment que c’est la bonne chose à faire. L'idée de justice et d'égalité est au cœur de leur engagement. Cependant, certains reconnaissent que des hommes dans leurs entreprises peuvent être guidés par des motivations plus pragmatiques, comme le fait de soigner son image ou de se conformer aux normes socialement acceptées. Mais cette motivation, peu importe la raison, peut être entravée.
Les freins à l’engagement des hommes
L’étude identifie plusieurs obstacles à l'engagement des hommes en tant qu'alliés. Tout d’abord, le manque de conscience. Certains hommes considèrent que les inégalités de genre ne les concernent pas directement, tandis que d'autres n’y portent tout simplement pas d’intérêt. Ensuite, un essentialisme persiste, avec des participants attribuant des différences naturelles entre les sexes. Cette vision rend difficile la reconnaissance des discriminations plus subtiles.
Un autre frein important est la peur de perdre du pouvoir. Certains hommes peuvent voir les avancées des femmes comme une menace pour leur propre position, ce qui freine leur volonté de soutenir activement l’égalité des genres.
Enfin, il existe une confusion sur le rôle à jouer. De nombreux hommes estiment que les femmes doivent d'abord exprimer clairement leurs attentes avant qu'ils puissent agir en tant qu'alliés. Cela révèle un problème de passivité : au lieu de prendre l'initiative, ces hommes attendent que les femmes leur indiquent la marche à suivre.
Quel rôle pour les hommes dans la lutte pour l'égalité des genres ?
L’étude montre que, bien que certains hommes soient prêts à soutenir l'égalité des genres, leur compréhension des enjeux reste souvent limitée. Ils peinent à reconnaître les inégalités structurelles et à s'approprier un rôle actif dans la lutte contre le sexisme. La solution proposée serait de former ces hommes à reconnaître leurs privilèges et à comprendre comment ils peuvent concrètement contribuer à la transformation des normes de genre.
Conclusion
En conclusion, cette étude démontre que, pour que les hommes puissent devenir des alliés, il est nécessaire de promouvoir une meilleure compréhension des discriminations structurelles et d’encourager un engagement plus proactif. Les freins à l’engagement, bien qu'importants, peuvent être surmontés grâce à une sensibilisation accrue et à des changements culturels et institutionnels dans les milieux de travail. Nous arrivons à la fin de cet article. Je serai curieuse d'avoir votre avis sur la question, n'hésitez pas à laisser un commentaire. On se retrouve pour le prochain épisode de Développe !
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