Newsletter été Linkup : Le coping et la régulation émotionnelle pour mieux gérer le stress
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Coping et régulation émotionnelle, liens et divergences
Depuis plus de 25 ans, les recherches sur la régulation des états affectifs se sont accentuées (Delelis et al., 2011). On retrouve notamment des travaux sur :
la régulation des humeurs (Parkinson et al., 1996 ; Thompson, 1994),
la régulation du stress (Lazarus, 1966, 1993 ; Lazarus, Folkman, 1984),
la régulation des émotions (Gross, John, 2002 ; Gross, Muñoz, 1995 ; Gross, Thompson, 2007)
La régulation des affects
Pour Gross et Thompson, la régulation des affects est la catégorie qui regroupe l’ensemble de ces différents processus de régulation. Dans cet article, on parlera en particulier des liens et des divergences entre la régulation des émotions et la régulations du stress ou coping.
La régulation des affects peut prendre la forme de stratégies de coping, ainsi que de stratégies de régulation émotionnelle. Ces formes se recouvrent partiellement, mais différeraient dans les types d’actions qu’elles engendrent et dans les situations qui les amorcent (Delelis et al., 2011).
Le coping sert à gérer des situations négatives
Selon John et Gross (2007), le coping concerne en particulier les situations blessantes ou menaçantes. Il sert donc à réduire les affects négatifs que ces situations activent (Delelis et al., 2011). À l'inverse, la régulation émotionnelle s'applique autant à des situations négatives qu'à des situations positives.
La différence majeure entre les processus de coping et de régulation émotionnelle réside donc dans la diversité des actions possibles avec le coping (Gross, John, 2003 ; John et Gross, 2007 ; Delelis et al., 2011). Si la régulation émotionnelle ne concerne par définition que les émotions, le coping permet également de gérer des actions non-émotionnelles réalisés dans l’atteinte d’objectifs à faible charge émotionnelle.
Les différentes stratégies de coping
Dans cette partie, nous verrons plus en détails les différentes stratégies de coping. Lazarus et Folkman (1984) distinguent deux types de coping :
Le coping centré sur le problème
Le coping centré sur les émotions
Selon la situation, l’individu peut utiliser tantôt le premier groupe, tantôt le second, et parfois les deux ensembles.
Coping centré sur le problème
Le coping centré sur le problème comprend surtout la mise en place de stratégies comportementales visant la résolution de ce problème : définition du problème, génération de solutions alternatives, évaluation de ces alternatives en termes de coûts et bénéfices, choix d’une alternative.
Coping centré sur les émotions
Le coping centré sur les émotions, quant à lui, cherche à réguler le ressenti émotionnel face à une situation stressante effective ou imaginée (Lazarus et Folkman, 1984 ; Brandt et Al., 2021). Ce second type de stratégie est en lien avec les stratégies de régulation émotionnelles. Notamment à partir des principes de réévaluation cognitive (Gross et al., 2006) qui visent à modifier notre manière d’interpréter un événement (Brandt et Al., 2021).
Cette théorie souligne l'importance de l'évaluation cognitive, c'est-à-dire la manière dont une personne interprète une situation stressante. Une évaluation cognitive positive peut aider une personne à se sentir plus capable de faire face à une situation stressante. Tandis qu'une évaluation négative peut augmenter le niveau de stress et de détresse.
Les stratégies de résolution du problème
Depuis Lazarus et Folkman, les recherches se sont approfondies sur ces deux types de stratégies. En science de gestion, Ben Sedrine Doghri et Al (2021) ont mis en avant le rôle important du coping en tant que variable intermédiaire au stress et au flow. Ces auteurs abordent le coping à l’aide des travaux de Compas et Al., (2001) sur leur modèle du coping et de son principe d’adaptation.
Selon eux, cette adaptation
« se réfère aux efforts volontaires et conscients développés par l’individu pour régulariser ses émotions, ses connaissances, ses comportements et son environnement afin d’affronter une situation menaçante » (Compas et al., 2001 ; Wadsworth et Compas, 2002 ; Ben Sedrine Doghri et Al., 2021).
Pour les stratégies orientées sur le problème, ils expliquent que l’individu peut se trouver dans une perspective de le résoudre, de le recontextualiser ou encore de le réévaluer (Ben Sedrine Doghri et Al., 2021). De plus, Il pourra aussi opter pour des stratégies de distanciation ou de confrontation. Dans ce cadre, le coping agit sur le contrôle primaire de la menace. C’est-à-dire qu’il vise à modifier directement le problème et à régulariser ses réactions émotives (Ben Sedrine Doghri et Al., 2021).
Le brief cope
Parmi ces stratégies, on retrouve bien entendu la résolution de problèmes. La méthode d’évaluation du coping avec le Brief COPE caractérise cette résolution du problème par le coping actif (Muller et Spitz, 2003). Ce coping actif inclut l’amorçage d’action immédiate, l'augmentation des efforts fournis et l’exécution de tentatives de résolution de la situation (Muller et Spitz, 2003).
À l’inverse du coping actif, on retrouve notamment des stratégies de désengagement comportemental. C'est une stratégie de réduction des efforts qui amène à l’abandon de la situation stressante et des buts qui lui sont associés (Muller et Spitz, 2003).
Enfin, la recherche de soutien instrumental représente pour l’individu le fait d’aller chercher des conseils, un accompagnement et/ou des informations (Muller et Spitz, 2003).
Les stratégies de régulation émotionnelle
Adaptation face aux stresseurs
Les stratégies centrées sur les émotions admettent une adaptation de l’individu en vue de faire face aux stresseurs ou à ses répercussions (Ben Sedrine Doghri et Al., 2021). Dans ce cadre, ces stratégies s’attardent plutôt sur un contrôle secondaire de la menace. C’est-à-dire que les activités cognitives de l’individu vont permettre un auto-contrôle émotionnel, un évitement ou une auto-accusation (Ben Sedrine Doghri et Al., 2021).
Cela peut se traduire par la mise en place de stratégies positives comme le sport, la relaxation. À l’inverse, cela peut générer des actions négatives visant à fuir la détresse émotionnelle comme l’utilisation de substances. On parle, alors, de coping évitant (Muller et Spitz, 2003).
Le coping orienté sur les émotions comprend des stratégies comme l’acceptation, la restructuration cognitive, la distraction et la pensée positive (Ben Sedrine Doghri et Al., 2021).
Dans leur étude, Muller et Spitz (2003) ont permis de valider ces différents types de stratégies de coping centrées sur les émotions. Nous détaillerons, notamment, la recherche de soutien émotionnel qui s’attarde sur le soutien moral, la sympathie et l’empathie. Ces effets sont contrastés dans la mesure où cette forme de stratégie peut favoriser un retour sur des stratégies de coping centrées sur le problème (Muller et Spitz, 2003). Néanmoins, cette recherche de soutien peut être employée pour extérioriser ses affects sans admettre une réel ré-implication dans les actions de l’individu (Muller et Spitz, 2003).
L'évacuation des sentiments
On trouve aussi la stratégie d’expression de ses sentiments. Toutefois, celle-ci tend souvent à ne se centrer que sur sa détresse émotionnelle et à l’évacuation de ses sentiments sans aboutir à des solutions concrètes (Muller et Spitz, 2003). La distraction, quant à elle, consiste à détourner l’attention de l’individu envers le stresseur et le but associé au stresseur (Muller et Spitz, 2003). Le blâme correspond en un sentiment d’auto-culpabilisation où l’individu ne se fait que des reproches. Toujours dans le Brief Cope, on retrouve l’humour qui va dédramatiser une situation afin d’éviter d’être submergé par ses émotions. Cette stratégie se traduit par un « effort cognitif d’évitement » de l’individu afin de surmonter la situation stressante (Muller et Spitz, 2003).
Déni vs. acceptation
Deux stratégies se confrontent notamment : le déni et l’acceptation. Le premier est le refus de croire en l’existence du stresseur. Au début de la situation stressante, il peut être fonctionnel. Toutefois, sur le long terme, il empêche la mise en place de stratégies plus effectives (Muller et Spitz, 2003). Le second est bien plus efficace. La personne accepte la réalité de sa situation et se retrouve ainsi plus à même de s’engager à l’affronter (Carver et Scheier, 1999 ; Muller et Spitz, 2003). La stratégie d’acceptation possède deux aspects. L’acceptation du stresseur et l’acceptation d’absence de stratégie fonctionnels qui le deviendront si l’individu réalise des efforts de réévaluation. Enfin, plusieurs auteurs introduisent le concept de stratégies de coping dits religieux ou spirituel (Klauer et Al., 1998 ; Muller et Spitz, 2003 ; Brandt et Al., 2021).
Le coping centré sur le problème et celui sur l’émotion admettent donc deux processus différents. L’individu peut utiliser tantôt l’un, tantôt l’autre, ou même les deux ensembles (Tarquinio, 2022). Des études du coping centré sur le problème recommandent de réaliser une étude longitudinale sur le coping centré sur les émotions. Ce qui permettrait d’avoir un meilleur recul sur les différentes étapes et processus adaptatifs du coping (Ben Sendrine Doghri et al., 2021 ; Delicourt, 2021).
RDV demain, on continue à parler de management, de coaching et de psychologie !
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Bibliographie
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Bravo pour ce super contenu encore au rdv 👏👏👏